Dans la petite ville d'Ambazac, en Haute-Vienne, l'église conserve deux pièces magistrales : une châsse émaillée et une dalmatique.
La châsse est une merveille d'émail limousin qui a connu bien des aventures.
Mais la dalmatique ? Toujours présentée dans l'église du village, dans une vitrine ad hoc, ce vêtement de chœur en forme de croix aux manches courtes dérive d'un vêtement civil romain. Son usage remonte au IVe siècle. Il était porté par le diacre lors de la messe, des processions et des vêpres. Nous empruntons nos sources et images à Limousin Médiéval.
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Cette dalmatique figure dans les inventaires de l'abbaye de Grandmont en 1575 et 1666. Donnée à la paroisse d'Ambazac en 1793, elle aurait encore été portée par les nouveaux diacres chantant leur premier évangile dans l'abbaye au milieu du XVIIIIe siècle.
Selon la légende, la reine Mathilde, épouse de l'empereur d'Allemagne Henri V puis de Geoffroy Plantagenêt, l'aurait donnée en 1121 à Etienne de Muret, fondateur de l'abbaye. Cette reine, morte en 1164, soutint la construction de la nouvelle abbaye de Grandmont mais elle ne put lui offrir ce vêtement.... fabriqué deux siècles après sa mort !
Dorothy Shepherd a en effet prouvé en 1960 que le tissu ne pouvait être antérieur au XIIIe siècle. Ce tissu appelé "hispano-mauresque" a été étudié grâce aux vestiges d'habits princiers découverts dans des tombes de l'abbaye cistercienne de Las Huelgas, près de Burgos. Il s'apparente aux tissus mi-soie (soie en trame et lin en chaîne), datés du XIIIe siècle et largement diffusés en Europe septentrionale par le pèlerinage de Saint-Jacques de Compostelle.